L'hiver québécois est long et rigoureux. Lorsque les premiers Français se sont établis sur les rives du Saint-Laurent, l’adaptation à l’hiver représentait pour eux un défi de taille. Tous les aspects de leur vie ont été touchés : agriculture et alimentation, transports, habitation, vêtement, relations humaines et culture. Les Amérindiens ont grandement facilité leur adaptation. Puis, de génération en génération, l’ingéniosité des habitants et leur volonté d’atténuer les contraintes de l’hiver ont suscité l’invention d’outils et d’équipements plus performants, ainsi que l’apparition de nouvelles façons de faire. Aujourd’hui, il est possible de poursuivre à peu près les mêmes activités à l’année longue, une situation inconcevable il n’y a pas si longtemps. L’adaptation progressive à l’hiver marque notre histoire, notre patrimoine; elle meuble aussi nos musées et nos mémoires.
Le périple qu’Alexis de Tocqueville (1805-1859) a effectué aux États-Unis en 1831-1832 en compagnie d’un collègue magistrat, Gustave de Beaumont, avait comme but officiel d’étudier le système pénitentiaire. En fin de compte, il a surtout permis à Tocqueville de comprendre le phénomène de la démocratie et de son irrésistible avènement. Ce périple a en outre permis aux deux voyageurs de prendre contact avec des manifestations de la colonisation française en Amérique du Nord et avec des communautés francophones ayant survécu à la fin de la présence politique et militaire de la France sur le continent. Ainsi, Tocqueville et Beaumont ont séjourné au Bas-Canada à la fin de l’été 1831 et, du 1er au 3 janvier 1832, en Louisiane, plus spécifiquement à La Nouvelle-Orléans. Les observations réalisées lors de cette dernière visite constituent comme un contrepoint aux observations faites au Bas-Canada.
Alexis Lapointe est connu sous le nom du «Trotteur», du «Cheval du Nord», du «Surcheval» ou encore du «Centaure». Il a fait l’objet d’admiration, mais souvent aussi de railleries. De son vivant, il est demeuré un modeste travailleur un peu obscur suscitant la joie autour de lui par ses pitreries, mais après sa mort il devint un personnage fantastique ou un incroyable athlète tel que lui-même n’aurait sans doute jamais osé l’imaginer. Et que dire de l’exhumation de ses restes en novembre 1966 au cimetière de La Malbaie, 42 ans après sa mort, ou encore de l’exposition de son squelette dans des musées du Saguenay depuis près de 35 ans? C’est que cet homme de peu semble susciter plus d’intérêt encore après sa mort qu'il n'a pu le faire de son vivant.
Le voyage de Chateaubriand aux Etats-Unis et sur la frontière canadienne en 1791 fut un voyage initiatique qui a marqué toute son œuvre. Son chant du Nouveau Monde décliné dans ses romans et ses récits en a fait, pour les générations romantiques du XIXe siècle, « l’inventeur de l’Amérique » et, plus particulièrement, le réinventeur de la Louisiane. En récapitulant et en magnifiant les expériences des explorateurs, des missionnaires, des voyageurs et des naturalistes des débuts de la Nouvelle-France jusqu'à son époque, son oeuvre a donné le goût de l’Amérique à de nombreuses générations d’Européens. C’est ainsi que Chateaubriand appartient pleinement au patrimoine culturel de l’Amérique française.
Après avoir connu un succès considérable en Europe lors de leur parution en 1702-1703, les trois livres de Lahontan , principalement inspirés du long séjour qu'il a effectué en Nouvelle-France de 1683 à 1693, connurent une longue éclipse. Ils ont été redécouverts dans les années 1970 et sont alors apparus comme indispensables pour mieux comprendre l'évolution de la forme littéraire des relations de voyage et le courant libertaire qui a gagné l'Europe des «Lumières» au 18e siècle. Cette œuvre constitue également un précieux témoignage sur l'histoire du Régime français. Lahontan, anti-héros dont la fortune médiatique n'a rien de comparable à celle de Champlain ou d'autres figures mythiques de la Nouvelle-France, a produit une œuvre qui continue de nourrir notre compréhension du patrimoine culturel et de l'histoire.
La bière est la boisson alcoolique la plus consommée au Canada et au Québec. Boire de la bière est une tradition qui a pris racine au temps de la Nouvelle-France; le métier de brasseur est donc l'un des plus anciens pratiqués sur les rives du fleuve Saint-Laurent. Les conditions d'exercice de ce métier, ainsi que la popularité de la bière, se transforment cependant sous l'impulsion britannique, quand l'industrie de la bière prend véritablement son envol avec la fondation de la première grande brasserie de l'ère moderne, la brasserie Molson. À la faveur de la Révolution industrielle, la bière devient un produit de consommation de masse, fabriqué et emballé en usine, puis distribué au moyen de réseaux de plus en plus sophistiqués. De nos jours, les microbrasseries revalorisent les pratiques de brassage artisanal, tandis que plusieurs festivals font découvrir et apprécier les variétés de cette boisson très ancienne.
Le corridor formé par le canal de Lachine et ses abords a été reconnu Lieu historique national du Canada en 1996. Ce canal, inauguré en 1825, a permis d'ouvrir à la navigation la voie tumultueuse du Haut Saint-Laurent et a joué un rôle majeur dans le développement de l'Ouest du pays. De plus, sa position stratégique entre les portions est et ouest du Saint-Laurent a amené, sur ses rives, la concentration industrielle la plus diversifiée du pays. Ces éléments ont également favorisé le développement du port de Montréal, faisant de cette ville la première métropole du Canada.
Les gens avaient le cœur à la fête lors des célébrations du 100e anniversaire de la fondation de la Société du Parler Français de (la) Saskatchewan. C’est à Duck Lake, en février 1912, que la première convention des catholiques de langue française de la Saskatchewan a eu lieu. Qui plus est, c’est aussi en 1912 que la petite ville de Duck Lake a été constituée. C’est donc à la célébration d’un double centenaire que les Fransaskois et les citoyens de Duck Lake ont été conviés le 25 février 2012.
Créé en 1972, le Centre franco-ontarien de folklore célèbre son 40e anniversaire en 2012. On y conserve les travaux de son fondateur, Germain Lemieux s.j, qui constituent une œuvre fondatrice incomparable dans le domaine du patrimoine franco-ontarien. Reconnu en 1991 comme un organisme provincial, le CFOF est aussi pour les communautés francophones de la province un espace culturel important où, encore de nos jours, on s’affaire à recueillir, sauvegarder, diffuser, développer et mettre en valeur le patrimoine de l’Ontario français, notamment le répertoire de la tradition orale.
Créés en 1915 par le ministère de l’Agriculture, les Cercles de Fermières du Québec devaient à l’origine servir de rempart contre les effets néfastes engendrés par l’urbanisation et la modernisation de la société. Dès leur fondation, les Cercles ont eu comme objectif de veiller à la transmission du patrimoine culturel et artisanal du Québec. Ils se sont aussi donné comme mission l’amélioration des conditions de vie des femmes et le bien-être de la communauté. Leur longue histoire, parfois mouvementée, témoigne d’une ferme volonté de poursuivre ces deux aspects de leur mission, en dépit des nombreux défis qui se sont dressés sur leur route. Malgré une baisse importante de leurs effectifs au cours des trente dernières années, les Fermières continuent d’agir aujourd’hui comme gardiennes des traditions et de la justice sociale.
La chanson traditionnelle française demeure l’élément du folklore traditionnel le plus dynamique et le mieux documenté chez les francophones de l’Ontario. En plus du nombre impressionnant de chansons qui ont été recueillies et cataloguées par les folkloristes, la chanson continue de faire partie des fêtes familiales et communautaires à travers les régions francophones de la province. Depuis les refrains entonnés par les premiers voyageurs jusqu’aux festivals culturels contemporains, en passant par les chansons accompagnant les travaux dans les camps de bûcherons, la chanson traditionnelle a toujours reflété les facteurs historiques de peuplement des diverses régions de la province. Plus que tout autre élément de la tradition orale, elle a joué un rôle important dans l’expression identitaires et l’appartenance culturelle des Franco-ontariens. Elle constitue un élément clé de la mémoire collective.
La chasse à l’orignal occupe une place importante dans l’histoire et les traditions québécoises et canadiennes-françaises. Roi des forêts d’Amérique du Nord, gibier fabuleux, cet animal à l’allure puissante et à l’imposant panache incarne la force et l’endurance. Sa chasse a longtemps été non seulement une nécessité liée à la survie alimentaire, mais aussi un rite de passage pour les jeunes hommes. Depuis le milieu du XXe siècle, elle est devenue une activité essentiellement sportive et récréative, qui demeure encore fort appréciée de nos jours, tandis que l’on continue d’admirer la force symbolique et la charge mythique associées à l’orignal.
À un kilomètre du Parlement canadien, le secteur de la chute des Chaudières compte de précieuses traces de l’Amérique française. Le sentier des Voyageurs, les glissoirs à radeaux, le pont des Chaudières et le cadre bâti industriel sont autant de vestiges porteurs d’un vécu francophone interrelié à d’autres communautés. À ces biens s’ajoutent des personnages historiques nationaux dont Philemon Wright, fondateur du patelin qui deviendra la ville de Gatineau. Fait intéressant, la trajectoire historique du secteur des Chaudières se décline en une série d’œuvres paysagères qui ajoutent au lieu à la fois de la mémoire et de l’imagination, soit de l’esprit. Ces œuvres deviennent ainsi un important vecteur de l’esprit du lieu.
Lieu sacré et lieu de mémoire, le cimetière acadien a beaucoup changé au cours des siècles. Situé en milieu rural et près d’une chapelle ou d’une église paroissiale, le cimetière acadien est passé d’un simple espace vert planté de quelques croix de bois à un terrain soigneusement nivelé où dominent des stèles parfaitement alignées. L’iconographie mortuaire a aussi évolué. La croix, le doigt pointant vers le ciel et le cœur flamboyant ont cédé la place aux symboles profanes évoquant le travail ou le plaisir, comme le bateau de pêche, la scène de chasse, la carte de bingo ou la quinte au roi de cœur. Qu’ils soient anciens ou modernes, ces cimetières témoignent des coutumes et des valeurs de plusieurs générations d’Acadiens.
Au Québec, quelques prêtres sont parmi les premiers à utiliser une caméra et à saisir la portée culturelle du cinéma. Deux figures retiennent surtout l'attention : les prêtres Albert Tessier et Maurice Proulx, aujourd’hui largement reconnus comme des pionniers du septième art au Québec. Le cinéma québécois connaît, au début des années 2000, un regain de popularité. Le rôle majeur joué par le clergé dans l’élaboration d’un patrimoine cinématographique et culturel avant la Révolution tranquille des années 1960 demeure cependant en partie ignoré. Pourtant, son apport n’est rien de moins que l’appropriation collective du cinéma, durant une période dominée par les productions étrangères. Le clergé, après s’être initialement opposé au cinéma parce qu’il le considérait comme une invention « importée » pouvant corrompre la jeunesse canadienne-française, a peu à peu encouragé la projection de films dans les salles paroissiales, les sous-sols d'églises, les écoles, les collèges et les couvents. Il y voyait un outil supplémentaire pour véhiculer les valeurs catholiques.
Le Collège universitaire de Saint-Boniface est la plus ancienne institution d'éducation postsecondaire de l'Ouest canadien et occupe aujourd'hui le cœur de la francophonie manitobaine. Le Collège accueille près de mille étudiants par année, dont les étudiants francophones du Manitoba, du Québec et des provinces de l'Ouest, des étudiants anglophones en immersion et d'autres provenant de la francophonie mondiale (pays d'Afrique de l'Ouest, France et Territoires d'Outre-mer). Le dôme de l'édifice principal est un repère culturel et un symbole de la longue lutte pour l'éducation en français au Manitoba. Cet article présente l'histoire de cet établissement en mettant l'accent sur les principales étapes qui ont marqué son développement depuis ses humbles origines en 1818.
Coutume datant du Régime français, la criée des âmes est une pratique culturelle à la jonction du religieux et du populaire. À l’origine, elle prenait la forme d’un encan dont les profits servaient à payer des messes pour les âmes du purgatoire. De nos jours, elle constitue une activité de collecte de fonds originale permettant à des paroisses québécoises de subvenir à l’entretien des églises. À L’Islet-sur-Mer, dans la région de Chaudière-Appalaches, au Québec, une criée des âmes a lieu annuellement depuis 1980. Cette cérémonie est également une occasion privilégiée de ressusciter plusieurs pratiques culturelles ancestrales de la région, comme les promenades en berlots, les conducteurs de carrioles vêtus de « capots de chat » et les bolées de chiard blanc.
L’année 2009 marquait le centenaire de l’ouverture de Saint-Paul-des-Métis à la colonisation canadienne-française. Bien que la communauté existe depuis 1896, il est intéressant de noter que l’on marque l’anniversaire de l’arrivée des Canadiens français dans la région, passant ainsi sous silence le passé métis de cette communauté. L’ouverture de la colonie métisse aux Canadiens français a suscité au fil des années des débats chez les historiens, mais a aussi laissé de profondes cicatrices dans le cœur des familles métisses qui ont été obligées de quitter Saint-Paul pour aller s’installer ailleurs. Avec le temps, Saint-Paul est devenue une communauté dynamique déterminée à préserver la langue française et la culture francophone, mais aussi une ville réputée pour son multiculturalisme.
Situé près de Prairie du Rocher dans l’état de l’Illinois, le Fort de Chartres est le seul fort en pierre construit par les Français au cœur du continent nord-américain. Trois forts se succèdent entre 1720 et 1755, témoins de l’Empire colonial français établi dans le bassin du Mississippi au XVIIIe siècle. Laissé à l’abandon pendant plusieurs décennies, c’est dans l’élan de développement de sites historiques de la première moitié du XXe siècle que l’état de l’Illinois le reconstruit en partie afin de perpétuer la mémoire de la présence française dans la région.
Le Lieu historique national du Canada du Fort-Témiscamingue-Obadjiwan illustre l’importance de la traite des fourrures dans l’économie canadienne et témoigne de la rivalité franco-anglaise pour le contrôle de ce commerce. Il joue également un rôle central dans la définition identitaire des habitants du Témiscamingue, qu’ils soient d’origine anishinabe (algonquine), française ou anglaise. Cet endroit est fréquenté depuis 6 000 ans. Il a servi de lieu de rencontre et d’échange aux Anishinabes, aux voyageurs français et anglais qui se sont livrés à la traite des fourrures, aux colons canadiens-français du Témiscamingue. Devenu aujourd'hui lieu touristique, le site fonctionne dans un esprit de gestion conjointe entre Parcs Canada et la Timiskaming First Nation en vertu d’une entente de partenariat sur le point d'être conclue. Cette entente a pour objectif d'offrir aux visiteurs un programme d’interprétation pluriculturel.
Vue du large, la Forteresse de Louisbourg se dresse sur une péninsule basse située sur la rive nord-est de l'île du Cap-Breton, comme si elle surgissait de la mer. Par voie terrestre, le long de la route 22 à partir de Sydney, les quelques cinquante bâtiments de ce pittoresque complexe historique créent une impression tout aussi forte, tels des survivants d'une autre époque. En y regardant de plus près, le visiteur s'aperçoit que cet ensemble évoquant le XVIIIe siècle, presque entièrement entouré de fortifications, semble là depuis plusieurs siècles. Bien sûr, il n'en est rien, puisqu'il s'agit d'une reconstitution de Louisbourg au cinquième de la ville fortifiée originale qui comptait 250 édifices érigés par des colons français entre 1713 et 1745. Cet ambitieux projet de reconstruction a été élaboré dans la seconde moitié du XXe siècle et réalisé entre 1961 et 1975, afin de créer une attraction touristique culturelle d'importance au Canada atlantique et de susciter intérêt et fierté à l'égard d'un pan alors peu connu de l'histoire du Canada.
French Prairie, située dans la vallée de la Willamette dans l’État d’Oregon, tire son nom des familles biculturelles canadiennes-françaises et indiennes qui ont colonisé la région au cours des années 1820 et 1830. Ces colons franco-indiens ont été d’importants acteurs historiques dans la colonisation euro-américaine de la région qui a débuté dès les années 1810 avec le commerce des fourrures par voie terrestre. À l’origine, French Prairie était le domaine des Ahantchuyuk Kalapuyan, peuple autochtone dont la population a abruptement chuté au cours des années 1830 et 1840, à cause de la maladie et de l’émigration euro-américaine. Plus tard, la vallée de la Willamette est devenue une des principales destinations des colons américains empruntant la piste de l’Oregon pendant les années 1840. Après l’assimilation éventuelle des familles franco-indiennes et l’ascension politique des Anglo-Américains, le rôle historique des francophones a souvent été négligé dans les textes traditionnels de l’histoire de l’Oregon. Malgré tout, l’histoire et le patrimoine des colons francophones ont survécu dans la mémoire de leurs descendants. Aujourd’hui, les touristes du XXIe siècle qui visitent le Champoeg State Heritage Area ont l’occasion de découvrir les colons franco-indiens de French Prairie.
Les fromages du Québec jouissent depuis longtemps d’une renommée internationale. Le goût pour cet aliment fermier a bien évolué au fil des ans, s’enrichissant de nombreux apports culturels et technologiques. Les premiers colons l’époque de la Nouvelle-France apportent certaines traditions fromagères, puis les innovations techniques anglaises permettent de développer le savoir-faire québécois. Vers la fin du XIXe siècle, l’augmentation de la production laitière et la demande grandissante pour le fromage produit au Québec stimulent l’industrie laitière : le cheddar devient l’un des fleurons de l’économie agricole québécoise. Si la production fromagère s’est longtemps limitée à quelques variétés, on peut à présent trouver au Québec des centaines de fromages de toutes les régions. L’audace de certains artisans québécois conjuguée aux savoir-faire ancestraux des artisans venus plus récemment de France et d’autres pays d’Europe ont considérablement enrichi et diversifié la production québécoise. S’il a une longue histoire, ce précieux patrimoine alimentaire semble promis à un succulent avenir!
La goélette Saint-André a été construite à La Malbaie, dans le comté de Charlevoix, en 1956. par un des derniers constructeurs de goélettes du fleuve Saint-Laurent, le maître charpentier Philippe Lavoie. Son propriétaire, le capitaine Fernand Gagnon ,a fait du cabotage sur le fleuve Saint-Laurent jusqu’en 1976 principalement entre Montréal et Sept-Îles. À cette époque, les goélettes de bois ont été remplacées par des navires de métal beaucoup plus gros, plus rentables et adaptés à la navigation hivernale. Un des derniers témoins de la longue tradition maritime propres aux Québécois, la Saint-André, a été classée « bien culturel » en 1978. Nouvellement restaurée, elle est conservée au musée maritime de Charlevoix, tout près des rivages qui l’ont vu naître.
Prise globalement, la minorité francophone du Canada a survécu et se développe grâce à un investissement constant dans ce qu’on pourrait appeler la gouvernance communautaire, c’est-à-dire les formes d’organisation qu’elle s’est données afin de se constituer en collectivité et d’influer sur les pouvoirs publics. Aujourd’hui tissée de long en large à travers le pays, la gouvernance minoritaire francophone s’est progressivement instituée contre les assauts d’une majorité souvent malveillante. Par sa persistance et son ressort, cette gouvernance est riche en enseignements et s’inscrit dans le patrimoine culturel de l’Amérique française.
À l’arrivée des premiers immigrants français dans la vallée du Saint-Laurent, au début du XVIIe siècle, la raquette à neige était d’usage universel chez les Amérindiens. Elle leur permettait de se déplacer en hiver sans s’enfoncer dans la neige profonde. Les Français les ont aussitôt imités pour vaquer à des occupations parfois vitales comme chasser, faire la guerre, communiquer entre eux ou s’approvisionner en bois de chauffage. Au XIXe siècle, la raquette devient un loisir très populaire dans toutes les couches de la société. Aujourd’hui, après une brève période d’hibernation, elle reprend sa place dans le monde du sport et des loisirs grâce à de récents perfectionnements techniques. Le parcours de la raquette à neige illustre à merveille la persistance d’un patrimoine très ancien et son adaptation à l’évolution de la société, face à une constante de l'environnement canadien : l’hiver.
Jacques Cartier est l’un de ces explorateurs européens partis d’Espagne, du Portugal, d’Angleterre et de France au XVIe et au XVIIe siècles, principalement pour découvrir un passage vers la Chine mythique. Cartier est devenu l’un des « découvreurs » d’un nouveau monde, immense continent qui barrait le chemin aux navigateurs : les Amériques. En explorateur méticuleux, il a inventorié un vaste territoire s’étendant du golfe du Saint-Laurent jusqu’au site d’Hochelaga, devenu Montréal, et il a attribué ce territoire au roi de France. Il n’est toutefois pas parvenu à fonder une colonie durable. Les premiers historiens du Canada français l’ont proclamé découvreur du Canada au XIXe siècle, car Jacques Cartier servait très bien les intérêts nationalistes émergents.
Fait remarquable, c’est de la Champagne-Ardenne que sont venus quelques-uns des fondateurs les plus notables de l'Amérique française, en particulier pour Ville-Marie/Montréal. Même si l'apport numérique a été modéré: environ 2,5% du total des habitants. A peu près la même chose que la Bourgogne, un peu plus que la Franche-Comté et un peu moins que la Lorraine, toutes des régions limitrophes. Rien d’anormal étant donné sa position géographique éloignée de l'océan. Depuis l’an 2000, les initiatives se multiplient dans l’ancienne province de Champagne, afin de rappeler l’importante contribution de cette région à l’essor du fait français en Amérique aux XVIIe et XVIIIe siècles.
Selon le recensement de 2006, la population de langue maternelle française du Manitoba représente un peu moins de 4 % de la population totale de la province. L’histoire du fait français dans cette province, faite d’opiniâtreté et d’engagement pour la sauvegarde de ses spécificités culturelles et linguistiques, est toutefois empreinte de la richesse des héritages d’origines diverses qui la constituent. Les variétés de français en usage au sein de la communauté francophone témoignent encore aujourd’hui des traces linguistiques héritées des parlers importés par les colons venus du Québec, ou encore de l’Europe francophone aux alentours des années 1900.
Le Loudunais est une ancienne province française, actuellement située dans le département de la Vienne, d’où venaient certaines des premières familles de l’Acadie. Après plusieurs décennies de débat scientifique sur l’ampleur de cette migration, l’hypothèse reste controversée auprès des experts, mais est largement acceptée par les gens du Loudunais, qui tentent de conserver la mémoire des racines du peuple acadien. Une étude comparative des sociétés acadienne et loudunaise décèlent certaines ressemblances, tels que l’influence de la guerre, le rôle des représentants sélectionnés par la communauté, l’importance des sacrements de l’Église catholique et une économie basée sur l’exportation de surplus agricoles.
Huguenots est le surnom donné aux protestants français à partir des années 1560. Après l’interdiction du culte réformé en France, en 1685, le terme désigne aussi ceux d’entre eux qui émigrent clandestinement dans le monde entier Un tout petit nombre s’établit en Amérique britannique (futurs Etats-Unis), où, dès le XIXe siècle, ils laissent des traces mémorielles et patrimoniales sans aucune mesure avec leur importance, sous plusieurs formes : lieux, monuments, objets, toponymes et groupes associatifs. Depuis les années 1990, le Québec explore lui aussi la part de ses origines huguenotes et les patrimonialise à son tour. Cette créativité patrimoniale demande une explication.
La langue française est sans doute l’élément central du patrimoine que partagent les francophones du Nouveau Monde. Pendant plus de quatre siècles, le français d’Amérique a survécu et il a évolué, multipliant les variantes reflétant les environnements naturels et culturels dans lesquels il a pris racine, les chocs et les rencontres qui l’ont marqué, les occupations, vocations et domaines que ses locuteurs ont maîtrisés. Un des documents les plus importants pour l’étude de l’histoire du français nord-américain est le manuscrit intitulé « Façons de parler proverbiales, triviales, figurées, etc., des Canadiens au XVIIIe siècle », un petit calepin rédigé de 1743 à 1758 par le père Pierre Philippe Potier, missionnaire jésuite aux Hurons de la rivière Détroit. Ce lexique du parler canadien-français est le premier et, en fait, le seul à documenter le français parlé en Nouvelle-France. Potier a noté la plupart des mots de son lexique dans la région de la rivière Détroit, où il fut missionnaire de 1744 à sa mort survenue en 1781. Ce document revêt donc une importance capitale pour les francophones de cette région.
L'industrie forestière a joué un rôle de premier plan dans le développement économique, social et culturel du Madawaska depuis la première demie du XIXe siècle. Avec le temps, la forêt est devenue une composante importante de l'identité régionale de ce secteur du Nouveau-Brunswick. Partout dans la région, des monuments, des plaques, des œuvres d'art public, des sites architecturaux, des événements - célèbrent les succès et les échecs des travailleurs de la forêt : draveurs, bûcherons, conducteurs d'équipements forestiers, planteurs d'arbres, travailleurs des scieries, cuisiniers et autres. Plusieurs aspects du patrimoine culturel du Madawaska font écho à cette activité économique marquante.
L’ébénisterie artisanale est un des métiers d’art qui a traversé les siècles, les guerres et les révolutions industrielles, pour parvenir, presque miraculeusement, jusqu’au troisième millénaire. L’ébénisterie québécoise, bien que jeune, plonge pourtant ses racines dans des traditions anciennes. Comme nos ancêtres ont dû apprivoiser l’immensité de notre territoire, dès le début, les premiers ébénistes québécois ont dû apprendre à se suffire à eux-mêmes et à compter sur leur propre détermination. L’adaptation, la dextérité, la patience, la débrouillardise, l’habileté et la volonté de bien faire deviendront des caractéristiques propres à nos pionniers. Chaque meuble ancien québécois témoigne donc de l’adaptation de cette collectivité à toutes les époques de sa courte existence.
Depuis quelques années, on assiste à une véritable renaissance du métier traditionnel de forgeron autour de la ferronnerie d’art, du fer décoratif et de la restauration d’édifices patrimoniaux. Certains centres d’interprétation des métiers du fer, créés sur le site d’anciennes forges, vont jusqu’à offrir aux visiteurs et aux communautés avoisinantes un ensemble de produits utilitaires fabriqués sur demande par des artisans forgerons. Cette résurgence de pratiques que l’on croyait disparues ne peut se comprendre qu’à la lumière de la longue trajectoire historique des forgerons québécois, marquée par un enrichissement progressif des savoir-faire depuis l’époque de la Nouvelle-France. Il faut aussi souligner leur esprit de résilience face à tout ce qui pouvait constituer une menace pour leur profession : environnement inhospitalier, vicissitudes des cycles économiques, percée de la production industrielle de masse après 1850 et avènement de l’automobile au début du XXe siècle.
La pratique des guérisseurs, ces soigneurs du peuple tant décriés par le milieu médical, est plutôt mal connue. Si certains s'en remettent à d'étranges pratiques, à des secrets mystérieux, ou à des rituels religieux, un bon nombre de guérisseurs traditionnels s'imposent comme de simples praticiens sans autre désir que celui de soulager la souffrance humaine. C'est le cas des rebouteurs, appelés communément « ramancheurs » au Québec, dont la tâche consistait à replacer les os disjoints ou sortis de leur emplacement naturel. Aucune magie ici, mais plutôt une tradition héritée d'un long apprentissage et d'une transmission de génération en génération, le plus souvent par le biais de lignées familiales. Ainsi, selon des recherches ethnographiques plus récentes, les ramancheurs ne sont pas des « médecins du ciel » mais plutôt les dépositaires d'une technique ancestrale dont les résultats ont su satisfaire bien des Québécois d'hier, surtout aux époques où l'accès aux services médicaux n'était pas aussi facile que de nos jours.
En 2006, à l'occasion du 100e anniversaire de la fondation de la Ville de Gravelbourg, le groupe musical a cappella Octopus lança son premier disque compact... après 43 ans d'existence ! Créé en 1963 au Collège Mathieu par le père Fernand Binette, o.m.i., cette formation fransaskoise allait connaître bien du succès et de nombreuses mutations. Sa longue vie, étroitement associée au Collège Mathieu de Gravelbourg, s'inscrit dans l'histoire de la chanson française en Saskatchewan. Celle-ci a toujours joué un rôle important dans la vie culturelle des Fransaskois, comme forme d'expression, occasion de rassemblement et source d'identité. Au cours du XXe siècle, elle se manifeste sous forme de chants patriotiques, de festivals et de boîtes à chansons, de chant choral et de vedettes nationales comme Hart Rouge. De nos jours, malgré des difficultés économiques certaines, la musique en français demeure bien vivante dans la communauté fransaskoise.
Niché à l'extrémité est de la péninsule gaspésienne, le site de Percé retient l'attention depuis des siècles. Sa géologie sans pareil séduit autant qu'elle étonne. Falaises abruptes, monolithe calcaire géant, terre rouge, cap blanc, mariage grandiose de la mer et de la montagne. Percé fascine et s'impose comme l'un des joyaux naturels du Québec. Riche d'une histoire humaine plusieurs fois centenaire, principalement marquée par la pêche, puis le tourisme, le site sert d'écrin à deux joyaux du patrimoine naturel canadien : l'impressionnant rocher Percé et l'île Bonaventure qui abrite la plus grande colonie de fous de Bassan au monde. Le Parc national de l'île-Bonaventure-et-du-rocher-Percé, créé en 1985, assure la protection de ce patrimoine naturel exceptionnel.
En toutes saisons, le caractère sauvage du parc national du Mont-Tremblant séduit les visiteurs. Ce parc d'une superficie de 1 510 km2, avec ses montagnes et ses érablières mêlées de sapins à perte de vue, ses 400 lacs et ses six rivières, offre des paysages caractéristiques des Laurentides au nord de Montréal. De sa création comme réserve forestière en 1895 à l'obtention du statut de parc national en 2001, ce territoire a connu plus d'un changement de vocation et de superficie. Tout au long de son histoire, l'usage que les humains y ont fait des forêts et de la faune témoigne de l'évolution des contextes culturels et économiques.
Ville nouvelle du XVIIe siècle, Rochefort fut fondée en 1666 par Louis XIV pour offrir à la Marine un arsenal au débouché du fleuve Charente. Cette fondation répondait aussi à la nécessité de se doter d’une plateforme d’expansion coloniale vers la Nouvelle-France. Frappé d’obsolescence au XIXe siècle, l’arsenal vécut au siècle suivant un déclassement qui l’a mis à l’abri des destructions. Son patrimoine bâti d’exception supporte depuis un quart de siècle le renouveau de la ville. Rochefort mise aujourd’hui sur son passé pour faire face, grâce au tourisme et à la culture, aux rudes mutations économiques qui ne cessent de l’affecter.
Au XVIIIe siècle, le fort Saint-Joseph est l’un des plus importants postes frontaliers de la portion ouest de la région des Grands Lacs. Fondée par les Français dans les années 1680, ce qui était à l’origine une simple mission deviendra, pendant près d’un siècle, un important centre d’activité religieuse, militaire et commerciale pour les populations amérindiennes et pour les colons européens. Si les collectionneurs de la fin du XIXe siècle connaissaient l’emplacement du site, celui-ci tombe dans l’oubli jusqu’à sa redécouverte, en 1998, par des archéologues de l’Université du Western Michigan. Les fouilles successives jointes à l’implication du grand public pour la préservation et la mise en valeur de ce site ont permis de faire renaître l’intérêt pour l’histoire et le patrimoine de l’époque coloniale française.
Peu d’événements dans l’histoire du Québec ont donné lieu à autant de parutions que les rébellions de 1837-1838. Surtout, nul événement, lointain ou récent, n’est à ce point constamment invoqué par les enjeux du présent. On n’a qu’à penser à l’apparition inopinée du drapeau patriote lors de la plupart des manifestations publiques. Ce phénomène n’est pas nouveau. Depuis 1837, le regard historien sur les rébellions patriotes a été particulièrement influencé par les conditions historiques où chaque historien se trouvait lui-même plongé. Nous proposons donc une revue sommaire des principaux débats historiographiques qui ont eu cours sur ce thème depuis 175 ans en lien avec le contexte historique, en attendant sans doute qu’une nouvelle génération analyse à son tour le passé avec les yeux du présent.
Le lac Tremblant est connu par la proximité du mont Tremblant qui le surplombe. L’originalité du site réside dans le fait que le lac Tremblant est scindé en deux cantons par un découpage territorial historique qui a engendré deux trajectoires paysagères distinctes. La partie sud du lac et la montagne qui le surplombe se sont développés en une station récréative internationale ; tandis que le nord du lac s’est affirmé dès le début du XXe siècle comme un patrimoine protégé, témoignant des caractéristiques naturelles de la région. La Municipalité de Lac-Tremblant-Nord a ainsi préservé et modelé les paysages qui constituent aujourd’hui son identité propre, fortement revendiquée par ses résidents. Ce patrimoine naturel précocement préservé, à la puissance évocatrice traditionnelle, est aujourd’hui menacé.
Au cours des derniers siècles, les forêts de l’est de l’Amérique du Nord ont subi des changements draconiens. L’ouverture des terres par les Européens venus s’y établir et les divers épisodes de coupes forestières qui ont suivi ont provoqué une véritable révolution dans la trajectoire écologique des peuplements. Les forêts de pin blanc n’ont pas été épargnées. Elles ont fait l’objet d’une quête acharnée qui a duré plus de 250 ans. L’exploitation de cette précieuse ressource a été si intense que la majorité des peuplements de l’est de l’Amérique du Nord sont aujourd’hui disparus. La coupe a connu son apogée au XIXe siècle, d’abord pour combler les besoins de la marine britannique, ensuite pour soutenir le développement des villes et des villages du Canada et des États-Unis.
Le 17 février 1997, une plaque était dévoilée à la législature albertaine à Edmonton. Simultanément, on commémorait le même événement à l'hôtel Fort Garry, à Winnipeg. En ce jour de célébration étaient réunis des membres de la Nation métisse de l'Alberta et du Manitoba ainsi que des représentants du ministère du Patrimoine canadien et d'associations historiques locales. On n'inaugurait aucun monument, on ne rendait hommage à aucune personne. En fait, les représentants des différents organismes présents soulignaient l'importance historique nationale d'une route de transport qui a marqué le Nord-Ouest au cours du XIXe siècle : la piste Carlton.
Du début du XVIIIe siècle jusqu'au milieu du XIXe, des centaines de ponts de bois couverts ont été construits au Québec. Ces constructions, qui étaient banales dans nos paysages au siècle dernier, ont traversé plusieurs époques de l'histoire économique et politique de la province. La construction systématique de ces ponts à l'architecture distinctive est un phénomène qui est de plus en plus étudié. Remplacés par dizaines lors de la mise à niveau du réseau routier amorcée dans les années 1950-60, moins d'une centaine de ces ouvrages subsistent. Ils font partie intégrante de notre patrimoine bâti.
Le Lieu historique national du Canada de Port-la-Joye – Fort Amherst est situé à proximité de Rocky Point, près de la route 19 sur la rive sud du comté de Queens, à l’Île-du-Prince-Édouard. Les visiteurs du site peuvent y voir les fondations recouvertes d’herbe du Fort Amherst, érigé par les Britanniques en 1758, ainsi que l’indication de l’emplacement de quelques structures associées à l'ancien Port-la-Joye - un avant-poste colonial français et l'un des premiers établissements coloniaux permanents de l'île. Le site comprend notamment les vestiges d’une maison ayant appartenu à Michel Haché dit Gallant et à son épouse, Anne Cormier, qui ont été parmi les premiers Acadiens à peupler l’île-du-Prince-Édouard.
En 1792, le Bas-Canada, qui deviendra éventuellement la province de Québec, fait sa première expérience en démocratie parlementaire en élisant les membres del'Assemblée législative, qui siégeront à Québec. Jusqu'en 1838, la population ira voter régulièrement, contribuant ainsi à l'établissement d'une toute nouvelle culture politique en terre d'Amérique. Ce faisant, en moins de cinquante ans, la démocratie naissante instillera les vieilles institutions d'alors, insufflant à la population le désir de prendre part aux débats publics par l'entremise de représentants élus. Toutefois, la transition démocratique en cours n'octroiera pas les pleins pouvoirs à l'Assemblée, majoritairement canadienne-française, sinon le droit d'exprimer plus librement ses opinions politiques. Le pouvoir réel sera encore entre les mains d'un cercle restreint d'Anglais, le Conseil exécutif, fidèles à la couronne d'Angleterre. C'est dans ce contexte de tensions, exacerbées par la volonté populaire d'obtenir un gouvernement responsable, que culmineront les Rébellions de 1837 et 1838. Toute cette expérience permettra à l'ensemble de la société d'alors d'adhérer aux pratiques démocratiques riches en éléments patrimoniaux, lesquelles sont toujours bien vivantes.
Pendant presque tout le XXe siècle, la presse écrite au Québec a été dominée par le modèle d’affaires du grand quotidien d’information, dans lequel l’information journalistique, très diversifiée, côtoie une abondante publicité. Ce modèle est repris par la presse catholique et régionale dès le début du siècle, alors que le format tabloïd s’avère très populaire en milieu urbain auprès de la masse ouvrière à partir des années 1920. Or, dans les dernières décennies du XXe siècle, des changements importants dans les pratiques journalistiques et les habitudes de consommation de l’information transforment considérablement le paysage de la presse écrite. Avec l’avènement du numérique et la pression exercée par les nouvelles technologies sur les médias dits traditionnels, cette presse est appelée à se réinventer à l’aube du XXIe siècle.
Le Quartier Petit Champlain à Québec est fréquenté annuellement par des centaines de milliers de visiteurs. Reconnu pour ses nombreuses boutiques d’artisans et ses restaurants, le secteur évoque, par l’aspect de ses bâtiments, un quartier historique d’une grande beauté. Pourtant, c’est un tout autre visage que l’endroit présentait jusqu’aux années 1970. Laissé à l’abandon depuis la fin du XIXe siècle, le quartier, devenu délabré et insalubre, a été le théâtre d’un vaste projet de revitalisation dans les années 1970 et 1980. Ce projet de restauration, né du rêve de deux hommes, constituait une approche inédite au Canada et visait à laisser visibles les traces des siècles passés dans l’architecture des bâtiments et à redonner vie à cette longue rue étroite en lui conférant sa vocation d’antan, celle de quartier d’artisans.
Instauré sur les rives du fleuve Saint-Laurent dès la décennie 1620, le régime seigneurial est le plus souvent considéré en tant qu'outil de peuplement et mode d'organisation du territoire. Dans cette perspective, les seigneurs sont perçus comme des colonisateurs qui entretiennent des rapports plutôt harmonieux avec les censitaires, dans le cadre de «droits et devoirs» réciproques. Cette représentation de la seigneurie en sol québécois en néglige cependant les caractéristiques fondamentales : hiérarchie et inégalité sociale. Elle sous-estime également la diversité du «monde» seigneurial et ses transformations dans le temps. La construction de la mémoire seigneuriale a été fortement marquée par l'œuvre de Philippe Aubert de Gaspé ainsi que par les historiens qui en ont subi l'influence tout au long du XXe siècle. Elle a aussi été presque imperméable à la relecture proposée par les historiens québécois depuis les années 1960.
Saint-Malo, « cité corsaire » située en Bretagne, a été fondée en 1308 sur une presqu'île qui permettait une défense contre tout assaillant venu de la mer. Détruite partiellement par un incendie en 1661, elle a été reconstruite dans les années suivantes par l'architecte Vauban qui donna à la ville son allure et son plan originaux, encore visibles aujourd'hui. Pourtant, Saint-Malo a été presque totalement détruite une seconde fois par des bombes incendiaires américaines en août 1944, mais elle a été reconstruite à l'identique après la guerre. Depuis, elle attire de très nombreux touristes venus du monde entier et tout particulièrement du Québec, car Saint-Malo, ville natale de Jacques Cartier, occupe une place spéciale dans la mémoire des Canadiens d'origine française. Saint-Malo est aussi l'un des ports des côtes normande et bretonne qui a participé activement à la pêche à la morue sur les grands bancs de Terre-Neuve du 16e siècle jusqu'à leur dépérissement récent. Saint-Malo est en outre la ville natale de François-René de Chateaubriand, l'un des plus célèbres hérauts français de l'Amérique du Nord.
Peu d’institutions sont davantage associées au patrimoine du Québec que le système seigneurial, implanté sur les rives du Saint-Laurent dès les commencements de la colonisation française. Le paysage, le patrimoine bâti et la toponymie de l’axe laurentien conservent l’empreinte du cadre seigneurial qui ne s’est éteint qu’en 1854, après avoir survécu près d’un siècle sous le régime britannique. Même après cette date, le système seigneurial va continuer longtemps à caractériser l’espace québécois, particulièrement en milieu rural. Si la seigneurie est l’un des éléments constitutifs de la trame historique du Québec, ses traces matérielles et mémorielles dans le territoire ne reflètent pas toujours l’importance de cette institution. Dans certaines localités, les traces du passé seigneurial ont donné lieu à une véritable entreprise de patrimonialisation, tandis que dans d’autres, elles paraissent avoir sombré dans l’oubli. L’exemple de Beauport, l’une des plus anciennes seigneuries canadiennes, peut servir d’illustration à cette situation paradoxale.
La tourtière est incontestablement le plat emblématique du Québec. Plus rare dans le menu quotidien, elle trône encore sur les tables lors d'occasions spéciales, notamment pendant le temps des fêtes. Il existe tout de même un débat entre ceux qui considèrent la tourtière du Lac-Saint-Jean comme la « vraie tourtière » et ceux pour qui la tourtière est un plat de taille plus modeste correspondant plutôt à un pâté à la viande. De fait, l’archétype de la tourtière du Lac-Saint-Jean est formé d’une abaisse placée dans un plat large et relativement profond, sur laquelle on dépose de nombreux morceaux de viandes et parfois de pommes de terre, le tout recouvert d’une abaisse, tandis que la « tourtière-pâté à la viande » est un mets plus simple, composé de viandes hachées enserrées entre deux abaisses. Malgré leurs différences, ces tourtières ont une origine commune aussi vieille que le monde et leurs chemins se sont constamment croisés, créant un patrimoine culinaire bien ancré dans les traditions québécoises.
Les célébrations entourant le bicentenaire de l’expédition menée par Lewis et Clark entre St. Louis, sur le Mississippi, et l’embouchure du fleuve Columbia, sur la rive du Pacifique, ont eu lieu en 2004-2006 aux États-Unis. Ces célébrations ont permis une réflexion sur la situation qui avait cours dans l’ouest du continent nord-américain autour de 1800. Elles ont révélé à la fois la dense présence francophone dans cette région et son extrême discrétion mémorielle. Les francophones Toussaint Charbonneau et George Drouillard, notamment, qui ont accompagné et guidé cette expédition, sont réapparus en pleine lumière. Des figures plus discrètes se sont aussi laissé deviner, comme René Jusseaume, Pierre Dorion, Joseph Garreau et tant d’autres, que le Corps de découverte de Lewis et Clark a croisés sur les rives du Missouri, auprès des tribus indiennes au sein desquelles ils pratiquaient le commerce des fourrures.
Arpenter les Twin Cities aujourd’hui, c’est laisser se dévoiler les couches enfouies de l’histoire de l’Amérique française. Les traces de la présence francophone y sont en effet multiples, quoique discrètes. Le Father Hennepin Bluffs Park sur les chutes Saint-Antoine entretient le souvenir des explorations du XVIIe siècle. La rue Larpenteur doit son nom à l’une des familles dominantes de la région des années 1830 aux années 1850. Le Cretin-Derham Hall High School et les co-cathédrales de Minneapolis et de Saint-Paul sont des signes toujours visibles de l’influence du catholicisme français dans la région. Il est facile de se laisser porter par l’histoire de ces lieux, même si localement la mise en valeur de ce patrimoine n’a rien d’évident.
Le roman Un homme et son péché de Claude-Henri Grignon, publié en 1933, a été immortalisé à travers de nombreuses adaptations à la radio, au théâtre, à la télévision, au cinéma et même en bande dessinée. Les récits gravitant autour de l’avaricieux Séraphin et de la pauvre Donalda rendent hommage à la société traditionnelle canadienne-française de la fin du XIXe siècle, à sa ruralité, à sa culture et à sa langue. Afin d’assurer la pérennité de l’ensemble de l’œuvre de Grignon, la Ville de Saint-Jérôme inaugurait en 2009 l’Espace Claude-Henri-Grignon, lieu d’exposition mettant en valeur de nombreux documents d’archives et des objets ayant appartenu à l’auteur d’un des téléromans les plus populaires de notre histoire télévisuelle : Les belles histoires des pays d’en haut. La popularité des fictions écrites par Grignon a traversé le temps et, encore de nos jours, bien des Québécois savent qui est Séraphin Poudrier et connaissent sa célèbre exclamation « viande à chien ! ».
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Encyclopédie du patrimoine culturel
de l'Amérique française.